Fogiel, un autocrate à BFMTV
Enquête sur le management de la « Première chaîne info de France » (1-3)

Marc-Olivier Fogiel, directeur général de BFMTV (photo Joel Saget/AFP)

Depuis qu’il a été nommé directeur général de BFMTV en 2019, Marc-Olivier Fogiel impose aux salariés de la « première chaîne info de France » un management très vertical. Mais dans un contexte ou la chaîne tout info de Patrick Drahi est régulièrement dépassée en audience par ses concurrentes CNews et LCI, des voix s’élèvent au sein de BFMTV pour réclamer une organisation du travail moins autoritaire, moins misogyne, et plus collaborative.

Que se passe-t-il donc à la tête de la « Première chaîne info de France » ? « Depuis son arrivée à la direction générale de BFM TV, Marc-Olivier Fogiel décide de tout. Il a centralisé le pouvoir de manière inédite, un peu à la manière de Vincent Bolloré, nous confie sous couvert d’anonymat un journaliste du service « Info géné » de la chaîne. Jamais un directeur général ne s’était autant impliqué dans l’éditorial ou le recrutement. ». « Il valide de nombreux éléments graphiques, il est présent, rapide », confirme un autre, tout en soulignant son talent. « Il a placé ses pions partout, tout le monde à peur », alerte une troisième. 

Au plan humain, l’ancien prodige de Canal + que les guignols de l’info ont longtemps dépeint accompagné d’une hyène ricanante, symbole d’une méchanceté supposée, est diversement apprécié : « Quand il est arrivé, il s’est installé un bureau au milieu de la rédaction, mais il ne dit pas bonjour! » s’étonne une journaliste. Avant de nuancer : « Sauf à Benjamin Duhamel, bien sûr » (éditorialiste politique à BFMTV, Benjamin Duhamel est le fils de Nathalie Saint Cricq, cheffe du service politique de France 2 de 2012 à 2019 et de Patrice Duhamel, ancien numéro 2 de France Télévisions). 

Dans les années 2000, les Guignols de l'info représentaient Marc-Olivier Fogiel accompagné d'une hyène, symbole de méchanceté.

Interrogé sur RTL en 2018, Marc-Olivier Fogiel indiquait ne pas avoir mal vécu sa caricature par les Guignols de l'info

En dépit de ce comportement humain parfois ressenti comme peu respectueux, le directeur général a ses « fans » : « Marc-Olivier Fogiel fascine pleins de petits jeunes de la rédaction qui ont des étoiles dans les yeux en le regardant. Il provoque un phénomène de cour. Beaucoup sont persuadés qu’il faut faire des coups, sinon, ils ne seront pas regardés par le Roi ». 

Du choix des reporters envoyés en Ukraine aux « visages de l’antenne », Fogiel se mêlerait de tout, déciderait de tout. « Depuis deux ans, il a pris véritablement les rênes, confirme un confrère. Il mène les entretiens pour de simples CDD et fonctionne au coup de cœur. On constate que la qualité des recrues a baissé. » 

Voir aussi : BFMTV, télé Macron : les liens de Marc-Olivier Fogiel avec l'exécutif affaiblissent ils BFMTV ?

Un climat d’intranquillité

Au cours de notre enquête, comme si BFMTV vivait sous terreur, la totalité des journalistes interrogés a requis l’anonymat. Même la société des journalistes n’a pas souhaité s’exprimer. De nombreux membres de la rédaction ont témoigné d’un climat d’intranquillité face au management instauré par le nouveau directeur général depuis deux ans et demi. « Il ne faut pas s’opposer publiquement et frontalement à Marc-Olivier Fogiel. Il répète souvent que si on est frustrés, on peut partir chez TF1 ou LCI », nous confie par exemple un journaliste qui estime que l’ancien directeur général, Hervé Béroud, laissait plus de responsabilités aux chefs de service. 

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