Sahara occidental
Le Maroc a-t-il corrompu l’Europe pour mieux piller les Sahraouis ? (1-2)

Maïlys Khider envoyée spéciale à Bruxelles

Le 27 février 2016, dans le camp de réfugiés de Dakhla, en Algérie, une réfugiée Sahraouie célèbre le quarantième anniversaire de la proclammation de la République arabe Sahraoui en arborant un drapeau  (photo Farouk Batiche / AFP)

Les ex-eurodéputés Antonio Panzeri et Gilles Pargneaux, visés par une enquête du parquet belge sur la corruption du parlement de Bruxelles par le Maroc, sont depuis des années instrumentalisés par le royaume chérifien pour plaider sa cause sur le Sahara occidental. La volonté de Rabat d’annexer ce territoire occupé depuis 1975 pourrait expliquer les généreux cadeaux de la monarchie marocaine dans les coulisses du parlement européen. Le 2 mars dernier, le parlement européen a annoncé qu'il allait se porter partie civile dans l'affaire du Marocgate.

En septembre 2022, la visite au Maroc de Josep Borrell, haut représentant de la Commission européenne pour les affaires extérieures et la politique de sécurité, est annulée. Quelques jours auparavant, sur une chaîne espagnole, le chef de la diplomatie européenne avait vexé Mohammed VI en jugeant nécessaire de « consulter » le peuple sahraoui sur son statut afin de régler le conflit territorial qui déchire le Sahara occidental depuis 1975. Résultat de cet affront : le dignitaire européen ne se rendit de l’autre côté de la Méditerranée qu’en janvier 2023. Banal incident diplomatique ? En plein « Marogate », ce « couac » souligne la force de frappe du Maroc et son influence auprès de l’Union européenne (UE).

Les révélations du parquet de Bruxelles et des médias belges et italiens sur d’éventuels faits de corruption de députés européens, et des déclarations récentes des services de renseignement belges selon lesquelles un « groupe d’eurodéputés (ndlr) travaillait en échange d’un soutien électoral orchestré par les autorités marocaines et de sommes d’argent considérables versées clandestinement, en espèces, par le Maroc », posent une question : à quelles fins le régime de Mohammed VI corrompait-il ces eurodéputés, notamment Antonio Panzeri, chez qui les enquêteurs ont trouvé 700 000 euros en liquide ? Quels intérêts le Maroc désire-t-il défendre au point d’offrir de telles valises de billets ?

« Le Sahara occidental, c’est la cause nationale numéro un au Maroc »

Ali Lmrabet, journaliste marocain en exil

Au fil de notre enquête, un dénominateur commun surgit : le Sahara occidental. Selon le journaliste marocain exilé en Espagne, Ali Lmrabet, c’est « la cause nationale numéro un » du royaume de Mohammed VI : « Cette question fait tout. Si demain, le Maroc perdait le Sahara, des décennies de sacrifices voleraient en éclat ».

Pour comprendre ce conflit territorial qui mobilise l’armée marocaine depuis près de 50 ans, il faut remonter à sa genèse. Située au sud du Maroc et en bordure de l’océan Atlantique, cette ancienne colonie espagnole d’environ 230 000 km2 et 600 000 habitants est convoitée depuis plus d’un demi-siècle.

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