
Malgré des performances décevantes, la vidéosurveillance algorithmique testée aux JO de Paris fascine collectivités territoriales et pouvoirs publics. Derrière cet engouement, un lobby s’efforce de construire l’acceptation sociale de ces logiciels sécuritaires pour qu'ils puissent être imposés dans notre quotidien.
Le rapport tant attendu sur l'évaluation de la vidéosurveillance algorithmique (VSA) pendant les JO de Paris a rendu en janvier ses premières conclusions. Malgré des performances de détection médiocres (Le Monde, 15 janvier 2025), les utilisateurs d’IA de surveillance (la RATP, la SNCF, la préfecture de police de Paris ou encore la ville de Cannes) ont émis un avis favorable à la pérennisation de ces dispositifs. L’enjeu est à la fois politique et économique : le maintien de ces logiciels de surveillance dans l’espace public est crucial pour l’activité des industriels du secteur.
Des centaines de millions d'euros de subventions d'Etat pour la vidéosurveillance
Les premières caméras de vidéosurveillance ont été officiellement déployées en 1991 à Levallois-Perret par Patrick Balkany, l’un des maires des plus condamnés par la justice. Le déploiement de cette technologie de contrôle de la population a été rendu possible grâce à un vide juridique — rien n’encadrait à cette époque la captation d’images dans l’espace public — et s’est fait sans contrôle sur le territoire avant sa légalisation en 1995.
Trente ans plus tard, on estime que 80 à 90 % des communes en zone urbaine sont équipées en caméras de vidéosurveillance (Laurent Muchielli, Vous êtes filmés !, Armand Colin, 2018). Plusieurs facteurs ont contribué à ce raz-de-marée : la pression des polices municipales, d’une partie des administrés et des commerçants sur leurs élus, l’hystérie sécuritaire politique et médiatique, « l’effet ruban » (inauguration d’un dispositif de vidéosurveillance dans une optique électoraliste) ou encore les centaines de millions d’euros de subventions de l’État (Antoine Courmont et Jeanne Saliou, « La vidéosurveillance en France : des zones urbaines aux zones rurales », 19 novembre 2021).