Paris Habitat
La révolte gronde sur Facebook (2-3)

Orian Lempereur-Castelli

Eric Pliez, maire du XXème arrondissement et Président de Paris Habitat, Ian Brossat, adjoint au logement et Anne Hidalgo, maire de Paris visitent un chantier de réhabilitation dans le 13ème arrondissement de Paris, le 13 septembre 2022. (Photo Emmanuel Dunand / AFP)

Dans le premier volet de notre enquête sur Paris Habitat (ex-OPAC), nous évoquions le calvaire des 281 000 locataires du 1er bailleur social de France (travaux mal réalisés, manque d’isolation, canalisations bouchées, pannes et accidents d’ascenseurs, …). Depuis des années, ils alertent leur bailleur et les élu·es parisien·nes sans avoir le sentiment d’être entendus par les équipes de Anne Hidalgo. Du coup, leur révolte gagne aujourd'hui les réseaux sociaux.

« J’ai envoyé une dizaine de lettres recommandées, à la gérance et à la direction territoriale, j’appelle, j’envoie des mails, souvent sans réponse » s’exaspère Nicole Mulot, 75 ans dont 50 comme locataire d’un HLM Paris habitat du 15ème arrondissement.
Particularité de sa cité, dite  « Avia-frères Voisin » : elle est implantée à l’extérieur du périphérique parisien. « Ici, on n’est pas dans Paris intra-muros », précise Nathalie, qui loue depuis 27 ans un appartement dans cette cité. « Il y a un mépris des locataires » estime Nicole.
Des courriers LRAR qui restent sans réponse ? La mésaventure semble fréquente pour les locataires de Paris Habitat. Présidente de la CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie) de la résidence Avia-Frères Voisins, Michèle Ravisé ne compte plus les mails et recommandés restés lettre morte ces dernières années : « Paris Habitat nous méprise. Le gérant nous promet énormément, puis derrière il n’y a rien qui suit ou alors les entreprises engagées ne sont pas toujours compétentes », déplore-t-elle.

Manque de considération

Interrogé·es, les locataires d’Avia-Frères Voisin ont rapporté à Off Investigation plusieurs épisodes témoignant pour le moins d’un manque de considération de la part de leur bailleur. En juin 2022, par exemple, Paris Habitat organise une réunion à propos des travaux sur les ascenseurs. Le jour J, aucune salle n’a été réservée par le bailleur. Les habitant·es s’étonnent aussi de l’absence de chaises, de micro alors même que la réunion est consacrée aux personnes à mobilités réduites et personnes âgées, qui ne peuvent se permettre de rester debout pendant plusieurs heures.

Le 27 septembre dernier, à la cité Avia-Frères Voisin, les locataires ont enduré une nouvelle humiliation, de la part de la mairie, cette fois. Cette après midi là, ils découvrent au dernier moment dans leur boîte aux lettres un prospectus indiquant qu’une « réunion de concertation » aura lieu le soir même à propos du réaménagement du site d’Aquaboulevard, un immense parc aquatique qui borde la résidence.

Le 27 septembre 2022, c'est le jour même d'une réunion d'information des locataires sur la rénovation de l'Aquaboulevard que ces derniers étaient informés de la venue dans leur quartier de Philippe goujon, maire du 15ème arrondissement.

Dans la soirée, Philippe Goujon, maire du 15ème, débarque protégé par des gardes du corps. Tout en reconnaissant que les HLM de Paris Habitat sont « vétustes » et que la mort d’un ouvrier ascensoriste, en juillet dernier, fut « atroce », il se lance dans un exposé dithyrambique sur la nouvelle galerie marchande qui va être construite sous l’Aquaboulevard avec restaurants, commerces de luxe, … « on s’en fiche, on peut pas se payer le restau ! » lâche une locataire.

Mal entretenue, la résidence Paris-Habitat Avia Frères-Voisin du 15ème arrondissement de Paris est envahie par des rats (photo DR)

Quand le maire déploie le calendrier de réaménagement de l’Aquaboulevard, une autre, qui se bat depuis des mois contre les rongeurs qui envahissent la résidence, craque : « Et pour les rats, il y a un calendrier ? ». Personne ne prendra la peine de lui répondre. 
A l’autre bout de Paris, au cœur du populaire 19ème arrondissement, le collectif « Génération Future Armand Carrel-Meaux » se sent également méprisé par les dirigeant·es de Paris-Habitat. Une de ses membres, Christine, refuse désormais de se rendre aux réunions publiques organisées par le bailleur, qu'elle perçoit comme « des thérapies de groupe, d’autosatisfaction ». Et d’expliquer : « C’est toujours dans les quartiers modestes … on nous laisse parler mais, pour finir, on a toujours tort et rien ne se passe avant le dernier moment, quand vraiment ça ne tient plus et que la presse risque de rendre publics les problèmes que nous rencontrons. »

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