Mardi 3 octobre, le Parlement européen a voté à une large majorité sa version du « European Media Freedom Act ». À l’origine bénéfique pour la presse, ce texte est en voie d’être saboté par la France, qui a introduit la possibilité d’arguer de la « sécurité nationale » pour surveiller les journalistes, y compris avec des logiciels espions.
À l'origine, le « European Media Freedom Act » se voulait un « renfort à la liberté de la presse en Europe ». Le texte a été initié en 2021 par le commissaire européen au Marché intérieur, le Français Thierry Breton, qui avait été proposé à ce poste par Emmanuel Macron en 2019.
Élaboré dans un contexte de guerre en Ukraine en vue d’endiguer des attaques d'États autoritaires contre la presse – typiquement en Hongrie, où les médias sont contrôlés à 80 % par le parti au pouvoir –, le texte fait depuis l’objet de négociations au sein des différentes instances européennes : la Commission, le Conseil de l’UE, et, enfin, le Parlement.
Parmi les avancées, le texte vise à obliger les médias à rendre publics les noms de leurs actionnaires physiques et les États à dévoiler annuellement des informations sur leurs dépenses publicitaires dans les médias. Par ailleurs, les États membres seront tenus de présenter, auprès de la Commission européenne, une évaluation de la concentration des médias et de son impact national sur le pluralisme de la presse.
Ces propositions font consensus. D’après Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), elles « ne mangent pas de pain ». Il en va autrement pour la question de la protection des sources, également abordées par le texte. Et, sur ce terrain, les résistances de la Hongrie de Viktor Orbán ont rencontré celles… de la France d’Emmanuel Macron.
L'alerte Pegasus
Le texte initial proposé par la Commission européenne le 16 septembre 2022 comprenait une protection quasi totale des sources journalistiques. Après la découverte en 2021 de l’utilisation par cinq États membres du logiciel israélien Pegasus (programme espionnant, à l’insu des victimes, la totalité de leurs données personnelles via leurs téléphones portables), la réponse législative devait être ferme.