Ep.03 | Gilets jaunes
Le maintien du chaos

➡️ En novembre 2018, des dizaines de milliers de « Gilets jaunes » se révoltent contre Emmanuel Macron après qu’il a supprimé l’impôt sur la fortune et alourdi les taxes sur le diesel. Chaque samedi, ils manifestent leur colère autour des ronds points ou sur les champs Elysées. Refusant de changer de politique, les Macronistes vont s’appuyer sur la police pour contenir et réprimer ce qui s’apparente à la plus grande révolte populaire depuis mai 1968. Un maintien de l’ordre qui fera en un an plus de 2500 blessés coté manifestants dont 400 blessés grave, et près de 2000 côté policiers et gendarmes. Au point de s’apparenter à un maintien du chaos? 

Le 1er décembre 2018, après deux samedis de manifestation dans toute la France sans réponse politique, la colère des gilets jaunes explose. A Paris, les manifestants prennent d’assaut l’arc de triomphe et se postent à son sommet. Des images qui feront le tour du monde. Pour la première fois depuis le début du mouvement, le pouvoir tremble. À partir de ce moment-là, le gouvernement va durcir sa doctrine du maintien de l’ordre. 

Le samedi suivant, l’exécutif va mobiliser près de 120 000 gendarmes et policiers. Désormais, le mot d’ordre, c’est d’interpeller un maximum de manifestants. Pour cela, le gouvernement va mettre en place des DAR : Détachements d’Actions Rapides. Le 8 décembre à Paris, les forces de l’ordre vont procéder à près de 1200 interpellations, 3 fois plus que le samedi précédent. 

Elles vont également réprimer les manifestants au moyen de matériels considérés par la législation internationale comme des « armes de guerre ». Depuis 2016, la police française est en effet dotée du Lanceur de Balle de Défense 40, du fabricant suisse Brugger et Thomet. Une arme intermédiaire capable de projeter une balle en caoutchouc avec une puissance 2 fois supérieure à une balle de tennis lancée à 200 km/h. Autre arme dangereuse: la GLI F4, une grenade lacrymogène contenant 26 grammes de TNT. 
En un an, sur les 2500 gilets jaunes blessés, près de 350 le seront gravement par ces armes. Une trentaine se retrouveront éborgnés, six auront la main arrachée. 

Face à la répression mise en place par le gouvernement, la France est rappelée à l’ordre par les Nations-Unies en mars 2019. À Genève la Haut-commissaire aux droits de l’homme et ancienne présidente du Chili Michèlle Bachelet dénonce devant l’ambassadeur français les violences policières lors des manifestations :  » En France, les « Gilets jaunes » ont protesté contre ce qu’ils considèrent comme leur exclusion des droits économiques et d’une participation à la vie publique. Nous encourageons le gouvernement à poursuivre le dialogue et demandons urgemment une enquête approfondie sur tous les cas rapportés d’usage excessif de la force ». 

Une remontrance dont le pouvoir français ne va pas tenir compte. Sur 456 plaintes pour des cas de violences policières contre des «gilets jaunes», seulement 19 ont fait l’objet de poursuites de la part de l’Inspection générale de la police, la police des polices. 

Point d’orgue de ce maintien de l’ordre, la mort de Zineb Redouane, 80 ans. Le 1er décembre 2018, à Marseille, des gilets jaunes manifestent. La police réplique à coup de grenades lacrymogènes. Au 4ème étage de son immeuble, Zineb Redouane est gênée par les gaz. Quand elle se rend à sa fenêtre pour fermer les volets, elle est touchée au visage par une grenade lacrymogène tirée par un policier. Le gouvernement niant toute responsabilité dans ce décès, l’affaire est entre les mains de la justice.

De l’émouvant témoignage de Jérôme Rodrigues, éborgné par un tir policier place de la Bastille le 26 janvier 2019 aux révélations de Jean-Pierre Mignard, avocat ayant échoué à convaincre Emmanuel Macron d’indemniser les victimes de violences policières en passant par les regrets de Michel Delpuech, préfet de police de Paris durant les cinq premiers mois de la révolte, cet épisode revient sur la répression de la plus spectaculaire révolte que la « France d’en bas » ait déclenché depuis mai 1968.