Chez Capital, Vincent Bolloré pervertit le journalisme

Vincent Bolloré, propriétaire de Vivendi, qui a racheté Prisma Media en 2021 | Photomontage Off Investigation

Un CSE extraordinaire est prévu ce 22 mai 2025 chez Prisma Media pour évoquer un plan de départs qui pourrait aboutir à la suppression de 54 postes. Depuis que le groupe, qui édite notamment le magazine Capital, est passé sous le contrôle de Vincent Bolloré en 2021, sa légendaire neutralité politique est remise en question. Enquête.

« Un dispositif spécifique de volontariat au départ sera prévu afin d'éviter au maximum les départs contraints », a fait savoir la direction de Prisma Media, dans un courriel adressé aux salariés, alors que les représentants du personnel sont convoqués pour un Comité Social et Economique (CSE) extraordinaire ce jeudi 22 mai. À l'ordre du jour : un plan de licenciement qui pourrait aboutir à « la suppression à l'automne de 54 postes ». Enième bouleversement chez Prisma Media, racheté en 2021 par Vivendi...

Si on vous demande de citer des médias appartenant à Vincent Bolloré vous répondrez sans doute : Canal+, Cnews, feu C8, le JDD ou encore Europe 1. A côté de ces figures de proue, dont certaines sont devenues les porte-voix d’une idéologie d’extrême-droite, ultra-libérale et conservatrice, le milliardaire breton détient également le mastodonte Prisma Media. Un monolithe noir installé à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) qui aligne une dizaine de titres bien connus du grand public dont Geo, National Geographic, Femme actuelle, Voici, Télé Loisirs, ou Capital.

Le plan social prévu chez Prisma intervient dans un contexte morose pour la presse papier. Prix du papier en hausse, lectorat en chute libre, pub sous tension, IA en embuscade… Autant de phénomènes connus qui frappent toute la presse. Mais dans le cas du titre phare de Prisma, Capital, des freins éditoriaux auraient également plombé les comptes. Chez Capital, pourtant historiquement pro-business, la critique des stratégies entreprenariales n’a jamais été absente. Des enquêtes fouillées, parfois piquantes, ont toujours fait partie de l’ADN du titre... jusqu'à l'arrivée de Vincent Bolloré. « Même si la ligne a toujours été pro-business, nous explique Emmanuel Vire, secrétaire général du SNJ-CGT à Prisma, les journalistes sortaient des papiers poil à gratter, des enquêtes sur les grands groupes. Et ça, on nous a bien expliqué que c’était terminé. »

Des annonceurs qui font leur loi ?

Le 24 février 2025, Capital publie un article titré : « Alain Afflelou : l’opticien star a trouvé comment grassement compléter sa retraite ! ». Le soir même, l’article est retiré de la page d’accueil du site, puis réécrit le lendemain. En cause : le mot « grassement », jugé trop péjoratif. Nouveau titre ? « Les recettes malignes de l’opticien star pour compléter sa retraite ». D’après le récit d'Élodie Mandel, directrice des publications du pôle économique, une communicante d’Afflelou l’aurait appelée en urgence. « Au lieu de défendre la rédaction, elle a préféré dépublier immédiatement », souffle un journaliste qui souhaite rester anonyme, au même titre que l’ensemble des salariés interrogés par Off Investigation.

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