Privatiser l’AFP ?
Quand Sarkozy et Bolloré voulaient affaiblir la 3ème agence mondiale(13-42)

Jean-Baptiste Rivoire

Siège parisien de l'agence France Presse (anciennement Havas), 3ème agence mondiale d'information (photo DR)

Dès le début de son quinquennat, dans sa folle tentative de contrôler l'ensemble du système informationnel français, Nicolas Sarkozy va chercher des noises à l'AFP, jugée insuffisamment hostile à Ségolène Royal. Pressions, chantage à la privatisation, tout y passe. En coulisse, son ami Vincent Bolloré tente lui aussi d'affaiblir l'AFP en lui développant une concurrente : la branche française de l'agence américaine Associated press. Mais au sein de l'AFP, la résistance de Sylvie Maligorne, alors cheffe du service politique, va changer le cours de l'histoire.

En cette année 2008, les proches de Nicolas Sarkozy vont d’abord entamer un bras de fer avec l’Agence France-Presse, protégée depuis 1957 par un statut lui garantissant une certaine indépendance éditoriale. Coïncidence ? Vincent Bolloré cherche à l’époque à maximiser son influence médiatique en mettant la main sur une concurrente de l’AFP, la branche française de l’agence américaine Associated Press (AP), alors en pleine déconfiture. Dans l’espoir d’en prendre le contrôle, il s’allie à un ancien PDG de l’AFP, Bertrand Éveno. Dans ce contexte, les sarkozystes vont s’escrimer à déstabiliser l’AFP. Début 2008, le président annonce vouloir réformer les médias. Le 20 mars, le PDG Pierre Louette révèle que l’exécutif réfléchit à un projet visant à mettre fin au statut coopératif de l’agence. L’idée est de la transformer en société par actions, prélude à une éventuelle ouverture de son capital. Simultanément à ces projets de privatisation, le « clan Sarko » va faire pression sur l’AFP pour obtenir un traitement plus favorable.

Guerre d'usure

En avril 2008, suite à une plainte de deux ex-attachées parlementaires estimant que la totalité de leur salaire ne leur a pas été versée, Ségolène Royal, l’ancienne candidate socialiste à la présidentielle, est condamnée en appel. Estimant l’affaire emblématique, l’UMP organise une conférence de presse et diffuse des communiqués. Considérant qu’ils ne sont pas assez repris par l’AFP, le porte-parole du parti présidentiel, Frédéric Lefebvre, entame une guerre d’usure, fustigeant la « censure » de l’agence et s’insurgeant comme par hasard contre sa « situation de quasi-monopole » : « Nous attendons de l’AFP une position claire sur la nécessité de traiter les dépêches factuelles. L’exigence démocratique veut que l’AFP traite ces dépêches de manière complète, surtout quand il s’agit d’éléments nouveaux dans le débat », estime-t-il début mai.

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